L’auto : un mythe auto-suicidaire

A l’heure où les problèmes de mobilité pénalisent de plus en plus les habitants du pays et particulièrement ceux de la Région bruxelloise des 19 Communes, de nombreux experts prônent ouvertement la relance de la demande de voitures, afin de redynamiser le secteur industriel en difficulté.

Tout le monde (ou presque) sait que l’empreinte écologique de la voiture (dans sa production et son usage) n’est plus acceptable, tant les effets de destruction de la planète sont graves.

La véritable alternative, surtout en ville, passe inévitablement par le développement des transports en commun (trams et bus) et d’autres moyens de transport, tels que le vélo (dont le vélo électrique) et la marche selon des parcours piétonniers sécurisés (notamment, pour accéder aux écoles).

Nous sommes choqués par les nombreuses désinformations qui circulent au sujet de la voiture et
de la mobilité dans les médias et le manque d’ambition, voire de courage de nombreuses autorités
politiques régionales et municipales.

Ainsi à Uccle, nous vivons dans une commune qui comprend plus de 50 écoles, dont de très
grandes. Cette seule réalité géographique, qui concerne des dizaines de milliers d’élèves et
d’enseignants, aurait dû stimuler une politique de transport en commun autrement plus efficace
que celle des ruptures de charge en vigueur.

De plus, de nombreux aménagements de voiries, privilégiant les alternatives à la voiture, tardent
à être exécutés. Nous sommes très inquiets de constater que les mesures, qui s’imposent pour
réussir un plan communal de mobilité digne de ce nom, ne sont toujours pas mises en œuvre. Pire : la situation continue à se dégrader, alors que, dans des villes européennes de plus en plus nombreuses, une véritable politique de mobilité au service de l’intérêt général, perçu dans un contexte de société durable, se met en place. Il suffit, par exemple, de prendre le bus à Paris pour se rendre compte de l’efficacité des mesures prioritaires prises depuis longtemps, par des hommes politiques aussi bien de droite que de gauche.

A l’heure du monde déboussolé par les crises financières qui révèlent crûment des dogmatismes d’experts peu scrupuleux et dangereux pour l’humanité entière, il devient urgent de donner la priorité à l’humain. Le défi devient authentiquement civilisationnel. Une vraie civilisation, digne de ce nom, au service de tous les hommes, est encore à construire ; ne nous leurrons pas, une telle nécessité implique de nouvelles techniques de production et d’encadrement. La ville, notamment
avec ses quartiers et ses rues, doit retrouver une finalité sociale dans un environnement durable et intégrateur.

Pour faire d’un enfant un homme, il faut des milliers d’heures de communication, d’instruction et d’éducation. La rue du quartier, entre autres choses, joue un rôle-clé. Ce n’est pas en voiture qu’on communique correctement. Nous ne sommes pas contre l’usage de la voiture, mais contre son utilisation excessive, qui tue la ville et sa culture d’émancipation humaine.

Un fait aggravant et inquiétant : le comportement incivique d’un nombre croissant de conducteurs. Si nous ne réagissons pas, si nous ne nous mobilisons pas pour promouvoir d’autres valeurs que
celles d’un matérialisme stupide, axé sur les apparences et le court terme, et aux conséquences écologiques et économiques destructrices, nous n’aurons plus d’avenir.

Plus que jamais, l’ACQU continuera à plaider et à agir au sein de notre tissu social et politique pour que les choses changent réellement et significativement ; cette attitude, guidée par la nécessité d’un monde plus humain, s’inscrit dans la finalité de la Charte d’Aalborg.
Rappelons que l’objet global de celle-ci, signée le 27/05/1994 (par 2.250 administrations régionales et locales de la plupart des pays européens, dont la Belgique) est axée sur le développement de villes ouvertes et accueillantes, prospères, créatives et durables, qui fournissent une bonne qualité de vie à tous les concitoyens et permettent leur participation à tous les aspects de la vie urbaine. Pour ce faire, les collectivités locales ont élaboré leur propre plan d’action, dit « Agenda 21 local ».

La Commune d’Uccle a, bien sûr, son Agenda local ; et les autorités communales nous ont demandé
de participer au Comité de pilotage de cet Agenda, avec la Ligue des Familles.

Nous regrettions que le thème de la mobilité ne fasse pas explicitement partie de l’Agenda 21
ucclois, les autorités politiques uccloises précisant que le Plan communal de mobilité, soumis
il y a 2 ans à l’enquête publique, devait être mis en œuvre.

Depuis lors, il nous a été confirmé la création prochaine d’un “Conseil consultatif ucclois de la
mobilité“ dans le cadre de cet Agenda 21, dans lequel siègerait, entre autres, notre Association de
Comités de Quartiers Ucclois. Cet objectif nous paraît incontournable voire impérieux tant la problématique de la mobilité s’aggrave dans notre commune de plus en plus envahie et polluée par un nombre grandissant de véhicules qu’un éventuel métro ne résoudra d’ailleurs pas.

Cette mise en place d’un “Conseil consultatif ucclois de la mobilité“ s’impose d’autant plus que les engagements des Communes de Watermael-Boitsfort et d’Auderghem (qui font partie avec Uccle de la même zone de police) sont plus explicites sur le sujet, Auderghem parlant, par exemple, d’un Plan communal de mobilité durable, révisable chaque année.

L’ACQU fera donc partie du Comité de pilotage de l’Agenda 21 avec la Ligue des Familles, et participera dès lors à ses travaux en espérant concrètement contribuer à la mise en oeuvre de
réflexions et d’actions dignes de la Charte d’Aalborg. L’enjeu est bien la promotion de bonnes conditions de vie des Bruxellois et Ucclois, malmenés par bien des incohérences spatiales, politiques et économiques. Un vrai projet de ville au service de tous les habitants, jeunes et moins jeunes , et qui donne un sens à nos vies, est plus que jamais à l’ordre du jour.

Bernard JOURET
Président

Lettre aux habitants 58 – octobre - novembre - décembre 2008